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Mazarinade n° B_5_56

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Anonyme [1652], HISTOIRE DE MAGDELAINE BAVENT, Religieuse du Monastere de Saint Loüis de Louviers. Avec sa Confession generale & testamentaire, où elle declare les abominations, impietez, & sacrileges qu’elle a pratiqué & veu pratiquer, tant dans ledit Monastere, qu’au Sabat, & les personnes qu’elle y a remarquées. Ensemble l’Arrest donné contre Mathurin Picard, Thomas Boullé & ladite Bavent, tous conuaincus du crime de magie. DEDIÉE A MADAME LA DVCHESSE d’Orleans. , françaisRéférence RIM : M0_1640. Cote locale : B_5_56.



CHAPITRE VIII.
A cause du recit que j’ay fait de mes enlevemens au Sabat,
qui ont esté publiez par tout, la curiosité a porté plusieurs
personnes à m’enquerir de diverses choses sur le sujet de ce lieu
infame. Mon Confesseur m’a defendu absolument de leur en
parler pendant ma prison en cette ville ; & m’a dit, que je ne devois
respondre là dessus qu’à mes Iuges. Dieu sçait combien cette
defense m’a coûté de mepris, d’humiliations, & de tourmens d’esprit,
parce que le monde qui me visitoit, s’est imaginé que le Demon
me fermoit la bouche, & que je n’avois garde de penser à
vne conversion serieuse, puis que je ne leur voulois rien dire : mais
je m’en vay presentement les contenter, & on desire que j’en parle
amplement, pour le faire abhorrer, & afin qu’vn chacun connoisse
mieux la grieveté de mes crimes effroyables. Toutesfois
dans tout ce que je diray de ces matieres, je supplie ceux qui verront
cét écrit, de n’y ajoûter qu’autant de creance qu’ils trouveront
estre à propos, & de separer ce qu’ils penseront estre réel
d’avec ce qui portera quelque marque d’illusion ; c’est à moy de
rapporter tout en esprit de sincerité, cõme je pense l’avoir veu ; &
c’est aux esprits plus intelligens de faire le discernemẽt necessaire.
Iamais je n’y ay esté enlevée que de nuict, & apres avoir dormy.
On me venoit toûjours appeller, & d’ordinaire devant Matines,
qui se disent à minuict chez nous ; soit vne fois la semaine, soit
deux fois ; soit de plus loin à loin, sans que les jours fussent determinez.
Ie me levois, éveillée comme du premier somme, pour
aller respondre à la voix, qui me sembloit estre d’vne Religieuse
de la Maison ; & dés que j’arrivois à la porte de ma Cellule, je me
sentois transportée, sans pouvoir discerner par qui ni comment,
perdant toute connoissance, jusques à ce que je me trouvasse en
ce maudit lieu. Mon Confesseur m’a fait voir icy que ç’a esté vne
de mes fautes de m’estre levée pour aller à ma porte, puis que je
pouvois bien sçavoir ce qui m’alloit arriver, apres ce qui s’estoit
passé les premieres fois. En effet je le reconnois ainsi ; mais cela
ne m’est point venu pour lors en l’esprit, & je ne sçay comme je
n’y ay point pensé. Tant y-a que je ne me suis servie d’aucune
graisse, ni d’autre chose, pour y aller ; & personne ne doit croire
que j’aye sceu la maniere de me faire enlever, car cela n’est pas,
mes papiers montrent evidemment que ç’a esté par l’ordre &