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Mazarinade n° C_10_11

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Gondi, Jean-François Paul / [cardinal de Retz] [1649], SERMON DE S. LOVIS ROY DE FRANCE, FAIT ET PRONONCÉ DEVANT le Roy & la Reyne Regente sa Mere. PAR MONSEIGNEVR L’ILLVSTRISSIME & Reuerendissime I. F. Paul de Condy Archèuesque de Corinthe, & Coadjuteur de Paris: A PARIS DANS L’EGLISE DE S. LOVIS des PP. Iesuites, au iour & Feste dudit saint Louis, l’an 1648. , français, latinRéférence RIM : M4_79. Cote locale : C_10_11.


du nombre de ceux que reprend l’Escriture, quand elle dit : Corripite inquietos
& inordinatos. Et ce discernement est particulierement demandé
à Dieu par le Psalmiste pour les Rois, Deus iudicium tuum Regi da. Assez souuent
vn Iuge plaist plus à Dieu en rendant la Iustice qu’en faisant oraison, &
quelquefois vn Roy suit plus exactement les volontez du Ciel à la teste d’vn
bataillon que dans son Oratoire. Et par cette conduite ce grand Monarque
dont nous celebrons auiourd’huy la memoire, a attiré sur ses exploits les benediction
du Ciel ; & par cette conduite ses armes ont esté sanctifiées par
vne glorieuse Paix.
 
Les vostres, SIRE, ne sont pas moins iustes, elles n’ont pas eu de moindres
succez. Cette importante victoire remportée si fraischement & si glorieusement
dessus vos ennemis est vne marque visible de la constante benediction,
que Dieu leur donne. Elles n’ont pas vne moins bõne cause. En naissant
vous vous les estes trouuées dãs les mains. Dieu vueille par sa misericorde
qu’elles ayent bien-tost vne aussi bonne fin ; Dieu vueille que vos victoires
soient bien-tost arrestées par vne heureuse paix. Ie vous la demande,
SIRE, au nom de tous vos peuples affligez, & pour parler plus veritablement,
consommez par les necessitez inseparables d’vne si longue guerre ; &
ie vous la demande auec liberté, parce que ie parle à V. M. d’vn lieu, d’où ie
suis obligé par ma conscience de vous dire, & de vous dire auec authorité
que vous nous la deuez.
Mais, helas, ie me reprends, SIRE, si la paix estoit dans vos mains innocentes,
il y a long-tẽps qu’elles auroient fait à la terre ce don si precieux : la
Reyne vostre Mere les auroit desarmées pour la gloire du Ciel & pourle repos
du monde. Vostre ieune courage auroit cedé à sa pieté. Elle est lasse de
ces funestes victoires, que l’on achepte par le sang de ses suiets. L’opiniastreté
des ennemis de vostre Couronne a rendu iusques icy inutiles tous les efforts
qu’elle a faits pour leur propre tranquillité, & pour leur propre salut. C’est
donc à Dieu, Chrestiens qu’il faut demãder la Paix, & non pas au Roy : C’est
de sa bonté qu’il faut esperer qu’il flêchira les cœurs de ces Princes obstinez
à leur perte ; & ie m’asseure, Madame, que ces prieres ardentes, dont vostre
Majesté presse le Ciel, ne sont particulierement employées qu’à le coniurer
qu’il fasse que le sang d’Austriche relasche vn peu de ce noble orgueil, qui
contre ses propres interests le rend trop ferme dans ses mal heurs. Ces vœux
sont si iustes & sont si necessaires au monde, que i’en attend le succez auec cõfiance.
Et ie n’en ay pas moins que quand Dieu leur aura donné leur effet,
Vostre Majesté, SIRE, ne se serue de la tranquilité de son Royaume aussi vtilement
pour l’auantage de ses peuples, que S. Louis se seruit du relasche que
luy donnetent ses premieres armes.
Il soulagea ses sujets, il poliça son Estat, il fit refleurir la Iustice, il reprima
les violences, il deffendit les duels, il chastia rigoureusement les impies & les
blasphemateurs. Ha ! SIRE, puis que vos sujets sont assez mal-heureux pour
imiter leurs peres dans les crimes, ne serez vous pas assez iuste pour imiter
vostre glorieux Ancestre dans ses Loix ? Et souffrirez vous aux yeux de la
France, qu’aux yeux de la Chrestienté, qu’à la veuë de Dieu que vous adorez