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Mazarinade n° D_2_38

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M. L. [signé] [1650], LETTRE OV EXHORTATION d’vn Particulier A MONSIEVR LE MARESCHAL DE TVRENNE, Pour l’obliger à mettre bas les armes. , françaisRéférence RIM : M0_2249. Cote locale : D_2_38.


le retour d’vn voyage qu’il vouloit faire en Delphes,
pour sacrifier à Appollo. Il y fust, mais ils attendirent long-temps,
& il ne retourna iamais, aimant mieux, & trouuant
plus seur de mourir que de leur rendre leur parole, & donner
liberté à leur inconstance. Ainsi les gouuerneurs de Tigres
& de Lyons se defient tousiours de leur humeur furieuse ;
parce qu’ils sçauent bien que la fureur naturelle se corrige,
mais qu’elle ne s’oste point entierement. La maxime des
prudens politiques est de craindre l’humeur legere du peuple,
& d’estre tousiours en estat de luy resister par la force, ou
bien de l’arrester par la douceur. Car d’attendre de la correction
du temps d’vn defaut qui se traduist de siecle en siecle,
ce seroit attendre vn miracle qu’on ne verra point. Il estoit
renfermé dans l’arche, Noé le sauua auec sa famille, il l’a
transferé à toute la terre, & comme il est eschapé du deluge,
il ne craint plus que le dernier embrasement. Voulez-vous
que ie vous fauorise encores dauantage, & que ie vous donne
dans ce lieu les raisons de cette instabilité eternelle, sur
laquelle est vostre fondement ?
 
Toutes choses naturellement tendent à leur perfection ;
c’est l’ardeur & l’amour des plus grands & des plus petits
estres, il n’y en a pas vn qui n’en soit espris ; & qui pour en
iouïr ne soit dans vne perpetuelle action. Si tost que la semence
est dans la matrice elle ambitionne la figure du corps
humain ; & ce corps n’est pas plustost organisé qu’il ne respire
apres de nouueaux tresors : qu’il ne souhaitte & qu’il
ne demande son ame. Lembrion est-il riche de sa forme
Celeste, il s’ennuie des-ja, il se lasse des tenebres qui l’enseuelissent,
il cherche iour & nuict le chemin du iour. Mais
le voila qui entre au monde, comment saluë-t’il la lumiere ?
par des cris qui semblent tesmoigner de la douleur, & de
la douleur d’estre encor enfant. Le reste de sa vie courte ou
longue, est tout semblable à sa naissance, & depuis le moment
qu’il est né iusques à celuy de sa mort, ses desirs &
ses esperances ne meurent point. Dans cet amour de perfection
commun à tous les autres estres, mais encores bien