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Mazarinade n° C_7_3

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Anonyme [1649], DECISION DE LA QVESTION DV TEMPS. A LA REYNE REGENTE. , françaisRéférence RIM : M0_871. Cote locale : C_7_3.


incomparable, comme tout le monde reconnoist & admire vostre
Majesté. On ne voyoit pas pour lors, comme on fait à present,
les gens de guerre, destinez pour la defense de l’Estat contre les
ennemis, employez pour estre les Sergens des Partisans, afin de
piller & ruïner le peuple. Nous n’auions iamais appris en France,
qu’il fallust des fuzillers pour leuer la taille. Cette race maudite
est trop execrable, pour auoir son inuention parmy les peuples,
qui se disent Chrestiens. On les a veus oster le pain aux meres, &
le laict aux enfans ; rauir les brebis, & laisser les agneaux dans la
neige : renfermer les troupeaux dans les estables, sans souffrir
qu’on leur donnast à manger, afin qu’ils y perissent de faim. On
les a veus auec blasphemes, prendre les Prestres à la barbe, battre,
blesser, tuer, brusler, sans qu’on ait osé se plaindre, à cause de
la protection qu’ils auoient aupres des Intendans. On a veu les
prisons pleines de miserables pour raison de la taille, où ils ont demeuré
les deux & les trois années, cependant que leurs enfans demandant
l’aumosne, ne trouuoient point de pain pour se nourrir.
On a veu des brigands voler & assassiner les Marchands en pleine
campagne, & au milieu du Royaume, sous pretexte de traitte foraine,
sans qu’on en ait peu auoir raison, mesme dans le Conseil
Priué du Roy. On a veu dans la plus grande fertilité des années,
les pauures Païsans manger l’herbe, & qui eussent creu d’estre à la
nopce, ayant du pain que l’on donne aux chiens, parce qu’ils n’auoient
pas vn sol pour en achepter. Et pour ne proposer point des
exemples esloignez, combien de fois vostre Majesté, Madame, a
elle esté importunée des clameurs & des plaintes de toute sorte de
personnes, & de toutes conditions, dedans & dehors de Paris, sans
qu’elles ayent receu aucun soulagement, parce que vostre Majesté
obsedée, a tousiours esté diuertie, de l’inclination naturelle qu’elle
a à la compassion, sous des pretextes impies & cruels, que l’on qualifie
du nom de Politiques.
 
Parmy tant & de si rudes traittemens, & durant tant d’années,
qu’a-on dit ? qu’a on fait ? L’Eglise & la Noblesse ont esté dans l’oppression
comme les autres, qu’elle émotion a on fait pour cela ?
a-on fait ligue ? s’est-on soûleué ? a-on pris les armes, encore qu’il y
en eust iuste sujet, contre ces sangsuës humaines, qui de laquais &
banqueroutiers, sont deuenus grands Seigneurs, & possedent des
biens immenses, qu’ils ont volé auec impunité, & ruiné l’Estat sous