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Mazarinade n° A_4_19

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Anonyme [1649], LA HARANGVE DES PROVINCIAVX FAITE A LA REINE POVR LE PROCHAIN retour du ROY en sa bonne ville de Paris. , françaisRéférence RIM : M0_1557. Cote locale : A_4_19.


d’entendre, il faut voir & practiquer. Vn Roy pourra conceuoir
l’idée de la plus parfaite Republique qu’il ne sçaura
ce que c’est de son Royaume, quand il voudra prendre possession
du gouuernement de l’Estat il n’en connoistra pas les
parties. Il trouuerra qu’il y a grande difference de lire dans
vn liure & de voir dans vne ville. Il s’imaginera que ses subjets
sont des gens barbares & estrangers. Il trouuerra l’humeur
de ses peuples bizarre, pource qu’elle ne luy sera pas
connuë & sans doute que quand il deura agir il aura besoin
d’étudier de nouueau.
 
Outre que le peuple qui voit ordinairement son Prince s’accoustume
aussi de l’aymer & de luy obeïr. Il ne trouue point
estrange des commandemens qu’il ne trouue point nouueaux,
& ses rigueurs mesmes, lui seroient supportables ne
luy estans pas extraordinaires. Il n’en arriueroit pas de mesme
à vn nouueau venu, qui n’auroit paru dedans son Empire
que le iour qu’il voudroit faire le tyran. Des Subjets
n’en voudroient possible pas reconnoistre le visage, de crainte
d’en endurer le regne. Les douceurs mesmes d’vn tel
Prince pouroient n’estre pas bien receuë, parce que les choses
qu’il faut introduire sont tousiours douteuses, & que leuenement
n’en est iamais asseuré qu’il ne soit entierement
accomply.
Il vaut donc bien mieux qu’vn Roy soit nourry parmy
son peuple, afin que le peuple s’accoutume à le reconnoistre
pour son Roy : & afin que cét amour ardent se forme, que
les subjets portent à leurs Monarques. Car s’ils ne le voyent
point comment le connoistront-ils, & s’ils ne le connoisent
pas, comment le pouront-ils aymer ? La presence du
Roy est tellement necessaire à sa grandeur, que nous ne
croyons pas qu’il puisse estre grand s’il ne se communique.
Sur tout en France où le peuple ayant accoutumé de voir
ses Roys, ne les ayme pas plus quand il est contraint de
moins ioüir de leur chere veuë, & ne les ayme pas moins
quand il a souuent le bon-heur de leur presence. Nous ne
sommes pas, MADAME, de ces peuples barbares, desquels