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Mazarinade n° A_8_35

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Anonyme [1649], LA RESPONSE DE LA RALLIERE A L’ADIEV DE CATELAN, SON ASSOCIÉ. OV L’ABREGÉ DE LA VIE DE CES deux infames Ministres, & Autheurs des principaux brigandages, volleries, & extorsions de la France. , françaisRéférence RIM : M0_3394. Cote locale : A_8_35.


pronostique tousiours de grandes reuolutions : & qui doute que
l’vnion du Parlement & de Paris ne produise d’heureux changemens
dans tout ce grand Royaume. Ce n’est pas vne chose nouuelle,
que des Gens tels que nous soient chastiez auiourd’huy pour
auoir opprimé l’innocence, fait triompher la malice, & banny les
vertus du commerce des hommes.
 
La mort violente est vne punition trop douce, en comparaison
de nos crimes. Le peché qui nous suit tousiours, est le bourreau qui
nous fait souffrir tous les iours mille morts pour vne. Nostre ame
est vn enfer, où les tourmens ne laissent pas d’estre cruels, encore
qu’ils soient inuisibles. En effect les Partisans peuuent tromper les
yeux des hommes, qui ne iugent que de ce qui leur paroist. Dans
la tristesse, nous pouuons contrefaire vn visage content : Dans l’inquietude,
vne grande tranquillité, & dans le desespoir, vne satisfaction
parfaite. Mais c’est vne importune & facheuse commedie que
nous sommes contrains de ioüer à toute heure. Car comme ceux
qui representent sur le theatre quelque personnage, ne sentent pas
les passions qu’ils tesmoignent aux spectateurs, & que cette feinte
leur est bien souuent penible : ainsi ils n’ont garde de gouster tous
les delices, dont ils veulent faire croire qu’ils iouyssent par leur
contenance trompeuse.
Dans vne pareille contrainte, nous souffrons vne gesne insupportable.
Si la nuict ferme nos yeux, ce n’est que pour nous enuoyer
des songes espouuentables, nous ne voyons rien qui ne nous reproche
nos crimes, & qui ne reuele à nostre auis, ce que nous commettons
dans nos cabinets. De iour nos consciences nous pressent de
mille remords : Nos visages changent de couleur à tous momens,
nos yeux se troublent, & cõme nous ne conceuons dans nos cœurs
que des impietez, il ne sort de nos bouches que des blasphemes,
mais nous sommes au desespoir, lors que nos iniustes desseins ne
reüssissent pas selon nos infames desirs, & à peine en ces rencontres
nous pouuons nous souffrir nous mesmes : tout nous fait peur, &
rien ne nous peut asseurer. Nos domestiques mesmes nous épouuantent,
& nous craignons l’abord de qui que ce soit qui nous visite.
Quand nous nous mettons à table pour manger, nous nous figurons
que toutes les viandes qu’on nous sert sont empoisonnées, &
que nous trouuerons la mort où nous cherchons la conseruation
de la vie.
Il ne faut point chercher d’où viennent ces terreurs qui nous
épouuantent, & ces chaisnes inuisibles qui nous ostent la liberté.