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Mazarinade n° A_4_4a

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Crespin [signé] [1649 [?]], FACTVM, Pour Maistre Bernard de Bautru Aduocat au Conseil Priué du Roy, intimé & appellant de la procedure extraordinaire, & sentence du 4. iour du present mois de Iuin, & demandeur. Contre le Substitut de Monsieur le Procureur General au Chastelet, appellant, intimé, & deffendeur. , françaisRéférence RIM : M0_1365. Cote locale : A_4_4a.


pas emporté la piece ; mais qu’il luy promit seulement de la venir prendre au premier
iour : que n’estant pas venu luy-mesme, Pierre Vaudran se chargea de ce manuscrit
pour le donner à imprimer, ce qu’il auroit fait quelques iours apres, &
le nommé Boucher l’auroit imprimé de son ordre & par ses soins.
 
L’accusé soustient qu’il ne faut pas beaucoup de raisonnement pour destourner
cette supposition ; c’est vn homme qui aduouë son crime, & qui se descharge sur vn
autre, il porte son reproche auec luy : il demeure d’accord que c’est luy qui a mené
le premier Imprimeur dans la maison de l’accusé : que ce premier Imprimeur
ayant manqué & n’estant pas venu, que l’accusé n’en a point recherché d’autres, mais
qu’il s’en est luy-mesme chargé, & qu’il a pris les soins de faire imprimer le Discours
au premier de sa connoissance.
Et bien que la pluspart des choses contenuës dans cette deposition ne soient pas
veritables, qu’elles soient fausses & supposées que l’accusé n’ait iamais parlé au nommé
Vaudran de faire imprimer la piece dont est question, le tesmoignage qu’il rend
contre luy-mesme peut-il seruir à la conuiction de l’accusé ? vn homme qui s’offre &
se defere luy-mesme en Iustice, qui se dit coulpable & criminel, ne peut pas estre condamné,
s’il n’y a encores d’autres preuues qui confirment sa confession ; & neantmoins
l’on veut que dans vne accusation destituée mesmes de toute apparence & de
presomption, ce nommé Vaudran puisse conuaincre l’accusé des crimes qu’il aduouë
luy-mesme, l’on veut qu’il trouue l’impunité dans sa personne, non pas à cause
qu’il s’accuse, mais parce qu’il en accuse vn autre.
Mais ce qui fait paroistre que ce tesmoin a esté prattiqué pour perdre vn homme
d’honneur, c’est qu’encores qu’on eut pris grand soin de l’instruire pour sa deposition,
il n’a pourtant pas laissé de varier dans sa confrontation ; car il n’y a que la verité
qui soit toûjours semblable à elle mesme, le mensonge est toûjours déguisé : dans
sa deposition il dit que l’accusé luy auoit encores mis entre les mains vne piece intitulée,
La Requeste des Prouinces desolées : & dans sa confrontation il dit au contraire,
qu’il l’a euë des mains de son Clerc, sans qu’il l’ait sceu, & hors sa presence. Cette
variation est tres-importante, & fait voir que ce nommé Vaudran est vn homme
qui cherche par tout des pieces secrettes & inconnuës pour en faire commerce, ou
plutost pour surprendre ceux qui s’en trouuent quelquefois chargez par la curiosité
naturelle & la conioncture des affaires.
La 3. raison qui est infaillible, & qui fait voir que ce nommé Vaudran est vn
homme qui est nourry dans l’impunité, & qui dans cette asseurance ne craint pas
d’entreprendre tout, c’est qu’estant luy-mesme coulpable de l’impression de la piece,
comme il demeure d’accord dans tout le procez, l’on n’a pas seulement decretté
contre luy, l’on ne l’a pas arresté prisonnier, bien que cela fut fort facile lors
qu’il a esté confronté à l’accusé, de sorte que cette consideration fait bien voir
que c’est vn homme qu’on ne veut pas perdre par ce que c’est vn tesmoin Bannal,
& qui peut seruir en beaucoup d’autres rencontres.
Le deuxiesme & dernier tesmoin est vn nommé Dedin imprimeur de cette ville
de Paris, qui ne dit rien autre chose sinon qu’il fut auec le nommé Vaudran
dans la maison de l’accusé, qui luy voulut donner sa Piece à Imprimer, mais
qu’il ne la prit pas ayant remis au Dimanche suiuant, ce qu’il n’auoit pourtant
pas fait.