Anonyme [1652 [?]], FABLE DV LION, DV LOVP ET DE L’ASNE. , françaisRéférence RIM : M0_1358. Cote locale : B_8_8.
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vne longue recherche de sa vie, s’accusa en cette façon.
Ce n’est pas, mes freres, que ie me veille dire sans peché,
& de n’auoir iamais failly, ou que i’estime mes fautes
moindres que les meurtres, & les dommages que vous
dites auoir commis, & que vous venez de confesser ; i’ay
ie ne scay quoy sur le cœur, que la conscience me reproche ;
ie croy qu’aprés vous l’auoir declaré, vous me iugerez
fauorablement auec equité sans chaleur ny passion.

 

I’ay seruy autrefois vn maistre si paresseux & si mauuais
mesnager, qu’il n’auoit autre soin que de son corps & de
sa peau, sans se soucier de la mienne, ny des autres bestes
de sa maison ; bien souuent vn affaire suruenant, falloit
aller auant le iour à la Ville ou au marcher, & sans auoir
repeuny mangé, on me iestoit le bats sur le dos auec ma
charge, force m’estoit de faire ainsi vne longue traite de
chemin par montagnes & vallées ; à la fin ie commençay
à m’ennuyer autant & plus de ma vie, que de la peine que
i’endurois ; vne pensée me vint vn iour en l’esprit de soulager
ma misere, & donner quelque peu de vigeur à mon
cœur abbatu, & mes forces languisantes ; ce fut, qu’en faisant
semblant de baisser la teste, tascher d’attraper quelque
brins de paille des soulliers de mon maistre, qu’il portoit
pour empescher de se fouller les pieds : ie ne tarday
pas long temps sans accomplir mon souhait, que voyant
quelque festu sortir, ie les pris vistement, & les mangeay
auec grand appetit ; si i’ay peché en cela, ie m’en confesse
& demande tres-humblement pardon.

A ces paroles le Lion jettant de trauers vn regard furieux,
& baaillant à gueule ouuerte, consulte le Loup & luy
demande son aduis, qu’il declara en vsant de ces termes,

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Anonyme [1652 [?]], FABLE DV LION, DV LOVP ET DE L’ASNE. , françaisRéférence RIM : M0_1358. Cote locale : B_8_8.