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Mazarinade n° C_1_19

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Anonyme [1649], LA CONFERENCE DV CARDINAL MAZARIN AVEC LE GAZETIER, Iouxte la coppie Imprimée à Bruxelles. , françaisRéférence RIM : M0_742. Cote locale : C_1_19.


n’y a point d’apparence, que parmy tant de personnes, quelque
changement qui arriue, quand mesme ie quitterois le supresme
Ministere, il n’en demeure tousiours vne bonne partie dans le
Conseil, & dans les affaires : Iuge de-là, s’il y a quelque chose à
craindre pour moy, & si ie dois apprehender la main de Vitry
souz le couuert de tant & de si fortes baricades ? Apres tout, en
arriue ce que le sort ordonnera, ne nous rendons point miserables
auant le temps, il suffira de former nos plaintes, quand nous sentirons
la douleur. Cependant reprenons le sujet de nostre entretien,
est-ce tout ce que tu as fait pour moy, que de prescher mes
loüanges, & de chanter iniures au Parlement ?
 
Gaz. Non certes, Monseigneur, ce n’est pas là tout, ce n’est que
l’entrée & la preparation des esprits ; mais pour venir au fort, comme
ie sçay les afflictions du peuple, & qu’il est reduit à la besasse,
afin de le flatter dans son mal, & arrester le mouuement de son desespoir,
qui estoit prest de fondre sur vous, ie luy ay fait accroire
que vous n’auiez pas profité de sa misere : que vous estiez le plus
pauure de vostre condition : que vous auiez mangé vostre patrimoine,
& épuisé tous vos parens pour aider à subuenir aux necessitez
de l’Estat, & vous entretenir dans la splendeur de vostre dignité à
la gloire des François : que vous estiez accablé de debtes de toutes
parts, iusques à ceux qui fournissent les choses necessaires pour
vostre bouche : & pour le verifier par induction qui est la plus forte
de toutes les preuues, I’ay fait voir que vous n’auiez aucune charge
dans l’Estat, aucun gouüernement, villes ny chasteaux dans le
Royaume : que la quantité de vos debtes & la multitude de vos
creanciers paroissoit par les oppositions formées à la vente de vos
meubles, & que ce seroit dans l’histoire vne honte à la France de
vous auoir laissé si pauure, apres tant de seruices.
Le Card A n’en point mentir, cette inuention paroist iudicieuse ;
car elle met la main sur le mal, & c’est en ce point, que ie te suis
obligé ; mais entre nous d’eux qui sçauons la verité de tout ce qui
se passe, il faut confesser ingenuëment qu’elle n’est bonne que pour
les aveugles des Quinze-Vingts, encore ne sçay-je pas si elle les
pourroit persuader. Car en premier lieu, encor que ie n’aye point
de charge dans l’Estat, à qui tient-il qu’à moy que ie n’en aye ?
n’est-ce pas moy qui donne les offices & les benefices ? N’ay-je
pas chassé les Capitaines des Gardes, pour y mettre de mes creatures ?
& quelles charges pourrois-je auoir apres celle de grand,
Souuerain & Pleni-potenciere Ministre ? apres celle de sur-intendant