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Mazarinade n° B_6_48

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Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.


C’est que lors qu’il consentit que cette Charge entrast dans la Maison de
Vendosme, il estoit ennemy declaré de cette Maison, & que lors qu’il s’y
opposa, Monsieur de Beaufort s’estoit remis entierement dans ses bonnes
graces. Cependant MESSIEVRS, il est certain que c’est icy le principal
fondement des malheurs de nostre Maison. Et cela est si veritable, que
l’Admirauté est entre les mains de Monsieur de Vendosme, & que le mesme
soir que les trois Princes furent conduits au Bois de Vincennes on ramena
au Palais Royal les trois Nieces du Cardinal Mazarin, afin que par
ce triomphe personne ne pust douter de la vengeance qui estoit si prompte
& si publique : & que l’on connust clairement, que c’estoient ses iniures
particulieres, & non pas les manquemens des Princes qui les priuoient
de la liberté. Que cette nuit fut honteuse à la France ! que ces spectacles
furent differends ! Les Princes du Sang estoient traisnez comme des coupables,
pendant que l’on adoroit au Palais Royal des Idoles, que la fortune
auoit tirées de la fange, pour estre fatales à la ruïne du Royaume.
Que ces feux qu’on alluma furent de mauuais augure ! quoy que i’aye bien
sceu (& cela auec vne extreme consolation) que les feux estoient rares &
dispersez : Et que pendant que les Emissaires du Cardinal Mazarin les allumoient
auec vne inhumanité & insolence, le bon Peuple se retiroit affligé
& triste, & que les gens sages & les honnestes Bourgeois pleuroient
chez eux les calamitez de l’Estat, preuoyant bien que de si funestes flâmes
pourroient estre les estincelles de l’embrasement des guerres Ciuiles.
Mais, MESSIEVRS, il faut se détourner d’vne si fâcheuse idée, & mieux
esperer de l’aduenir, puis que le remede en est entre vos mains. Il faut croire
que vous irez au deuant de tant de calamitez, & que déliurant la France
des peines qui la menassent, vous ayderez à luy donner la paix, & ensemble
à toute l’Europe.
 
Que si ie m’arreste encor sur cét endroit, ce ne sera plus pour y chercher
à renouueler ma douleur ; ce sera pour vous faire voir le peu de sens du
Cardinal Mazarin. Ce sage Ministre reproche icy des froideurs à Monsieur
mon frere : Qui a iamais oüy parler, que deuant des Iuges vne telle
accusation ait eu lieu ? bien loin de l’en deffendre, ie ne le croiray pas coupable
s’il l’auoit mesprisé. Ie dis plus, & tout le monde en sera d’accord,
il auroit beaucoup ajoûté à ses loüanges s’il l’auoit chassé. Il suppose
qu’ils est plaint du peu de confiance que la Reyne à euë en luy. Mais sur
ce sujet ie puis respondre ; que le rang que sa naissance & ses seruices luy
font tenir dans l’Estat & dans le Conseil, luy donnent assez de droit de
s’instruire des affaires ; il n’a pas eu besoin de capituler pour en auoir
part, & que pour rendre au Cardinal Mazarin ses mesmes paroles, auant
ces mauuais offices, lors qu’il s’est agy de bien traitter Monsieur le Prince,
la Reyne a tousiours eu la bonté de pancher plustost du costé de l’excés,
que de l’obmission.