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Mazarinade n° B_9_11

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Anonyme [1652], LA RELATION DE TOVT CE QVI s’est passé au Conseil de Monsieur le Prince, depuis son depart jusques a present, enuoyé à son Altesse Royalle. , françaisRéférence RIM : M0_3147. Cote locale : B_9_11.


necessaire ; la premiere estoit de tromper longuement la Reine par
l’esperance de menager le retour du Cardinal Mazarin, & cependant
se seruir de la confidence que son maistre luy donnoit aupres
de sa Majesté pour gouuerner les affaires selon ses volontez. La
deuxiesme estoit d’abuser le Cardinal par vne vaine esperance de
retour, auquel il esperoit faire naistre tousiours de puissans empeschemens.
Et enfin la troisiéme estoit de gagner Mõsieur le Prince,
afin de n’estre point trauersé dãs vne si haute entreprise ; cette consideration
l’obligea d’aller trouuer Monsieur le Prince sur le point
de son départ, de luy asseurer qu’il s’opposeroit tousiours au retour
du Cardinal en France pour l’amour de luy, & luy détourneroit
autãt qu’il luy seroit possible la connoissance des affaires, mais qu’il
falloit dõner quelque chose au temps & ne rien precipiter en cette
affaire, que la Reine l’appuyoit encore, & qu’on ne pouuoit empescher
qu’elle luy communiquast le secret, mais qu’en fin on l’engageroit
à s’en deffaire par les impossibilitez qu’on luy proposeroit
de son retour, que cependant M. le Prince se pouuoit mettre en repos
de costé-là, & pouuoit sur cette proposition faire son voyage
sans inquietude de la part de la Cour, se deuant asseurer sur sa parole.
 
Le peu de connoissance que son Altesse Royale auoit de toutes
ces choses, luy donnoit encor, dauantage à penser, mais la trop
grande chaleur de ses ennemis animez à sa perte le mit dans vne
autre peine.
Leur dessein alloit iusqu’à le pousser pour le rendre en quelque façon criminel
par vne suite, & luy oster la volõté de retourner à la Cour par le mauuais
traitement dont ils le vouloient menacer, ne se contentant pas de l’auoir
veu se disposer luy-mesme à ce voyage qu’ils auoient si ardament souhaité.
Ils donnerent donc le conseil de faire tenir secrettement des gens armez
sur son chemin dans le Palais Royal, & auprés de la maison de Monsieur le
Prince, la nuict qui deuoit preceder son depart, dequoy Monsieur le Prince
ne manqua pas d’estre aduerty ; mesme qu’on donnoit des ordres dans le
Palais Royal qui n’estoient connus de personne, & que tout cela tendoit à
faire armer secrettement des cheuaux legers & quelque compagnies des
Gardes, qui deuoient fur là minuict le venir surprendre dans sa maison.
Ces aduis qui venoient de bonne part & en quantité, le firent resoudre à
ce qu’on vouloit de luy, il sort par vne porte secrette auec Monsieur le
Prince de Conty ; & tous deux se mettent au chemin de Mouron, mais ayant
apperceu quelque Cauallerie entre Mont-rouge & le Bourg la Reine ils rebrouslerent
chemin, & allerent chercher leur seureté au Chasteau de sainct
Maur, où leurs ennemis eurent bien du depit de les voir arrestez.
Tout le monde fut bien surpris de cette nouuelle broüillerie que l’on attribuoit
diuersement à plusieurs, sans en decouurir la veritable cause.