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Mazarinade n° A_9_2

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Fortin, Pierre (sieur de La Hoguette) [1650], CATECHISME ROYAL. , françaisRéférence RIM : M0_653. Cote locale : A_9_2.



L. G. Ie l’estime d’vne nature ambiguë ; mais qui tient neantmoins
beaucoup plus du mensonge que de la verité. C’est pourquoy
elle m’est suspecte, & ie pense que si V. M. pouuoit consulter
les Clouis, les Charlemagnes, & vôtre ayeul Henry le Grand, sur
ce sujet, ils ne seroient pas de l’aduis de Louïs XI. touchant cette
maxime. La dissimulation est d’ordinaire irresoluë, deffiante & timide,
qui sont toutes mauuaises qualitez. C’est la partie de la Politique
que ie trouue la plus basse, & qu’on ne met en vsage qu’au defaut
d’vne forte resolution, & d’vne intelligence tres-parfaite en
l’art de regner. Il est vray qu’elle est quelquefois necessaire pour
se maintenir : Mais les voyes obliques qu’elle tient, & les destours
qu’elle fait sont cause qu’on bat bien du païs, & qu’on ne fait pas
grand chemin Qui va comme les escreuices, ou comme les cancres,
en arriere ou de costé, n’auance gueres. Enfin le dissimulé est
reduit à vne perpetuelle obsession d’autruy pour le surprendre, ou
de soy-mesme pour sa seureté : l’vn & l’autre est indigne d’vn Roy.
L. R. I’auouë que ie suis tout confus, & que i’aurois tousjours
creu que cette maxime, que (qui ne sçait pas dissimuler, ne sçait pas
regner) estoit vn principe d’Estat. Mais quoy ! publieray-je le secret
de l’Empire ? Esuenteray-je tous mes desseins ?
L. G. Non, SIRE, il s’en faut bien empescher ; il n’y a pas moins
d’indecence ny de honte de mettre son esprit à nud que le corps. Il
faut estre secret & non pas dissimulé ; Qui dissimule se trauestit. Si
V. M. se masque iamais, elle verra par experience combien il est incommode
de demeurer long-temps sous vn autre visage, & sous vn
autre habit que le sien : Au lieu de se déguiser, il est bien plus à propos,
ce me semble, de se tenir couuert, & d’estre secret : Et comme il
n’y a rien plus digne de mépris que le babil, il n’y a rien aussi qui apporte
plus de veneration aux conseils des Rois, que quand nous
sommes surpris de quelque fameux euenement, dont l’effet vient
plustost à nous que le dessein. Et c’a esté à la faueur de cette belle
nuict d’Estat, qu’ont esté conduites à vne heureuse fin toutes les
hautes actions qui ont esté faites sous le regne du feu Roy vôtre Pers.
Vne partie de ce merueilleux Conseil qui gouuernoit alors nous
a esté ostée : mais on peut dire sans perdre le respect contre vne memoire
qui doit estre en veneration aux siecles presens & à venir :
que ce qui nous en reste est plus de saison & plus auantageux pour
vôtre Regne, que si nous auions encor le total.